
Toutes les mesures pour venir à bout des accidents de la route prises avant-hier, n’enchantent pas les acteurs du transport. Du moins celles relatives à l’interdiction de circuler de 23h à 5h du matin pour le transport inter urbain ; l’interdiction de toute transformation des
véhicules visant à augmenter les places assises pour les passagers ou à créer des porte-bagages supplémentaires ; sont entre autres, des décisions qui ne trouvent pas l’adhésion des coxeurs (rabatteurs) et des chauffeurs. Ces derniers, retrouvés à la Gare routière les Baux maraîchers, ont étalé leur désarroi, même s’ils approuvent certains points. «On ne peut pas éliminer les porte-bagages parce ce
n’est pas pour les chauffeurs, mais c’est fait pour les clients. C’est fait pour faciliter le transport des bagages des clients. Et c’est normal. Si cela ne dépendait que de nous, ces bus seraient dépourvus de porte-bagages. Nous, les bagages ne nous intéressent pas. Mais, c’est un droit pour les voyageurs de partir avec leurs bagages. Et on ne peut pas interdire à un client qui a déjà acheté son billet d’effectuer le voyage avec ses valises», a déclaré, sur les lieux, Matar Mbaye, un rabatteur. «Ce qui est faisable, au stade actuel, c’est l’élimination des places appelées ‘’Versailles’»
Concernant les restrictions faites et qui interdisent tout voyage interurbain, entre 23h et 5 h du matin, elles ne trouvent pas un écho favorable chez lui. «C’est impossible ! On ne saurait imposer aux bus des heures de pause obligatoire ou dire que nul n’a le droit de
rouler entre deux régions entre 23 h et 5 heures du matin. Cela n’existe nulle part au monde. Ils ont le droit de dire que ce sont telles catégories de plaques d’immatriculation qui vont faire aujourd’hui, le voyage. Et que demain ce sera le tour d’autres types de plaques,
comme c’est le cas au Nigeria. Le Sénégal n’est pas arrivé à ce niveau de développement du transport», a-t-il indiqué. A l’en croire, ce qui est faisable, au stade actuel, c’est l’élimination des places appelées «wersay». «A mon avis, seule l’élimination des ‘werasay’ est
possible. Car, à chaque fois qu’il y a un accident, les clients assis sur ces chaises s’en sortent avec des blessures».
Son avis, un de ses collègues rabatteurs ne le partage pas. Fallou, s’appelle-t-il, demande à l’Etat de leur trouver une solution rechange à ces porte-bagages qu’il déclare interdit. «S’il élimine le porte-bagage, qu’il propose une alternative pour assurer le transport des
bagages. Cela peut impacter négativement notre travail, mais ce n’est pas grave. Qu’il y ait une alternative», a-t- il indiqué.
Au sujet des voyages des bus entre minuit et l’aube, il dit être en phase avec son collègue : «Interdire un voyage à partir de 23 h, c’est inadmissible. Et cela porte préjudice au secteur et aux acteurs du transport. Ce que l’Etat doit faire, c’est de créer des aires de repos, sur certains axes routiers pour que les conducteurs puissent se reposer, à chaque fois que le besoin se fera sentir».
«Si l’Etat élimine le porte-bagage, qu’il propose une alternative pour assurer le transport des bagages» Moustapha Ndiaye, représentant de Gora Khouma, le Secrétaire général de l’Union des transporteurs routiers du Sénégal, indique que ce sont les usagers qui vont
pâtir de l’interdiction des porte-bagages. «Les bagages appartiennent aux clients et non aux chauffeurs. Comment feront les voyageurs avec leurs valises ?», s’est-il interrogé. La question laissée en plan, il insiste sur l’interdiction faite «de toute transformation des
véhicules visant à augmenter les places assises pour les passagers ou à créer des porte-bagages supplémentaires».
«Les places ajoutées appelées ‘wersay’ ne nous intéressent pas. Qu’elles soient éliminées ou non, cela importe peu. Tout le monde l’a
constaté, les chauffeurs des deux bus ne sont pas sortis vivants de cet accident de Kaffrine. Il ne faut pas oublier que nous, les chauffeurs, nous sommes des responsables. Nous avons des familles. Ce que le gouvernement doit faire, c’est de construire des routes
praticables et qui respectent les normes. Car, les routes sont responsables de beaucoup d’accidents de la circulation», dit-il en soulignant que l’Etat a tort de fixer les heures de circulation entre 5h du matin et 23h.
«Changer l’heure du voyage augmentera le nombre d’accidents, car les routes sont mauvaises. Et laisser les bus et les camions partir à la même heure créera un rush qui risque de causer de nombreux dégâts». Mamadou Moustapha Ndiaye, un des chauffeurs interrogés peste contre certaines mesures prises. «On est en phase avec l’Etat qui tente de réguler les porte- bagages. Mais, nous ne sommes pas des citadins. Donc, nos bagages et ceux de nos clients doivent faire le voyage. On ne peut pas les mettre dans des camions frigorifiques. Cela est faisable en occident. Mais, le secteur du transport au Sénégal ne peut pas subir ces mutations qui lui sont imposées», indique-t-il.
A l’en croire, l’idée de supprimer les places supplémentaires est à saluer. «Je n’ai jamais cautionné leur installation dans les bus. Ce que les gens doivent prendre en compte, par contre, sur cet accident est que c’est une volonté divine. Personne ne souhaite mourir lors d’un voyage. Toutefois, laisser les conducteurs faire le voyage la nuit, apporte plus de sécurité aux clients et aux chauffeurs. Parce que, cet accident de Kaffrine s’il s’était produit, durant la journée, ce serait pire», renseigne le chauffeur.
Khary DIENE